Je précise que l'article ci-dessous est extrait du "journal de Bayeux" de novembre 1904 (journal anticlérical). Ah ! le bon curé, mes amis !
Que celui de notre pays !La scène s'est passée dans une coquette commune des bords de la Seulles où le bère est réputé « raide bon et de toute première ».
Eu vue de célébrer la fête locale avec tout l'éclat possible, les jeunes gens de la commune, garçons d'initiative, ont eu l'heureuse idée de s'adresser à la générosité des personnes que le sort et les intérêts de ce coquet pays ne laissent pas indifférentes. Au cours de leur tournée, ils frappèrent à la porte d'une excellente dame, bien connue à Bayeux pour ses inépuisables largesses, et, comme d'habitude, leur appel fut entendu. Ce fut le curé de la paroisse qui reçut les dix francs de l'aimable donatrice avec prière d'en disposer pour la fête en question.
La Seulles n'est pas le Pactole et nos jeunes gens estimant que ces dix francs ne seraient pas superflus se permirent d'aller les demander à M. le curé.
M. le curé n'avait pas le temps et pria la jeunesse de repasser.
Elle repassa. Mais, ô comble de la guigne, M. le curé, à l'heure précise où l'on se présenta chez lui pour la seconde fois, offrait à un de ses bons amis un gueuleton soigné, si j'ose m'exprimer ainsi, et dont tous deux se pourléchaient les babines.
Vous pensez bien que ce n'était pas l'heure de venir réclamer au bon curé les deux thunes pourtant si impatiemment désirées. Celui-ci le fit bien voir aux importuns.
— Vous m'ennuyez, dit-il aux réclamants qui humaient de la porte du presbytère non pas le piot mais les délicieuses effluves de la cuisine si bien faite par Margot, vous m'ennuyez, et pour vous punir de votre insolence, j'emploierai les dix francs qui me furent confiés à une œuvre plus pieuse que la vôtre.Dimanche matin Je mettrai cinq francs à la quête que je ferai et dimanche soir je remettrai cinq autres francs à la requête que je referai!!!
C'est ainsi que contribua à la réussite de la fête locale le bon curé de X.... sur la Seulles et ses paroissiens trouvèrent originale cette manière d'étouffer la bonne galette d'autrui.
L'excellent homme n'a oublié qu'une chose : nous dire si la quête était à son bénéfice. En ce cas tout s'expliquerait car dans ces temps de persécution religieuse, on ne saurait trouver mauvais qu'un curé pense à se garder une poire pour la soif et, comme feu Tircis, songe dès maintenant un peu à la retraite.