Creully a eu, le dimanche 3 octobre 1920, son grand jour de souvenir religieux et patriotique pour ses enfants tombés glorieusement au champ d'honneur. C'était l'inauguration dans l'église d'une plaque commémorative, et sur la place de l’église, d'un monument public, consacrés à perpétuer la mémoire de ces nobles victimes de la guerre.
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Inauguration du monument au Morts de Creully. |
Dès le matin, à la grand-messe, rendez-vous avait été donné aux autorités locales, aux 70 soldats démobilisés, et aux familles des morts: tous avaient répondu à cette convocation.
MM. les membres du Conseil municipal et de la commission du monumentavaient tenu à honneur de se grouper dans le chœur de l’église pour assister officiellement à l'office. Aprèsla célébration de la messe du jour, M. le doyen, dans une brève mais pathétique allocution, rappelle les heures pleines d'angoisses, vécues par tous du 2 août 1914 au 11 novembre 1918, l'admirable abnégation de nos braves soldats, leur héroïsme devant la mort, et l'espérance chrétienne qui doit consoler les familles en deuil.
Le chant du « De Profundis », après le rappel des noms des 23 victimes de Creully, et le chant du « Libéra » terminèrent la cérémonie du matin.
L'église était déjà trop petite le matin pour contenir la foule des fidèles, désireux de témoigner leur profonde sympathie aux familles en deuil et d'unir leurs prières aux prières de l'Eglise pour leurs chers disparus; l'après-midi ce fut bien autre chose encore; beaucoup ne purent trouver place dans l'édifice sacré.
Réunis à la mairie, MM. les membres du Conseil municipal, accompagnés de M. Engeraud, député, de M.d'Olliamson, conseiller général du canton, de MM. les membres de la commission du monument, des enfants de toutes les écoles avec un bouquet de fleurs naturelles à la main et de tous les poilus démobilisés, organisèrent ensemble un défilé à travers les rues du bourg, magnifiquement décorées de guirlandes,d'arcs de triomphe et de drapeaux, et, musique en tête se rendirent à l'église, où ils eurent grand peine à pénétrer — tant la foule était dense — pour occuper ,les places qui leur avaient été réservées.
Après les chants liturgiques, M. le doyen procéda à la bénédiction de la plaque commémorative, et adressa à la foule recueillie et profondément émue une allocution toute de circonstance.
Répondant à cette question. A qui devons-nous la victoire? Il sut rappeler en un langage concis et saisissant toutes les causes secondes que le Seigneur, — pour qui la France est la nation de choix, — mit en œuvre afin de nous assurer le triomphe: génie des chefs, admirable civisme des hommes d'Etat, vaillance de nos héroïques soldats, sacrifice suprême des morts, sublime exemple du clergé, union sacrée de tous, générosité dans les séparations et les brisements du cœur.
Un salut en musique pieusement chanté par les jeunes filles termina la cérémonie religieuse.
De suite le cortège reformé pour se rendre au monument autour duquel tous, autorités, poilus, enfants des écoles segroupèrent pour assister à sa bénédiction donnée par M. le doyen, et entendre les orateurs.
M. le Chef d'Escadron de Druval prit le premier la parole: comme président de la commission du monument, il remit celui-ci à la municipalité en exprimant ses chaleureux remerciements à tous les généreux donateurs. Leurs abondantes offrandes ont permis de faire grand: sur un socle en granit surélevé de deux marches, se dresse fièrement un glorieux poilu criant « Victoire » et couronnant ses frères, tombés avant le triomphe final. Entouré de 4 obus reliés par de lourdes chaînes le monument est vraiment imposant.
M. le Maire,M. le Conseiller général, M. le député prirent aussi successivement la parole. Ce serait déflorer ces patriotiques discours que d'en donner ici une froide analyse, nous regrettons de ne pouvoir les reproduire entièrement: ils le mériteraient.
Entre ces divers discours vint s’intercaler la lecture d'une pièce de vers d’une forte conception et d’une belle envolée sur l’immense triomphe de nos vaillantes armées.
Après la Marseillaise et le chant du Départ joués par la musique la foule se sépara profondément émue.
Les poilus démobilisés devaient se retrouver bientôt réunis en des agapes fraternelles généreusement offertes par M. le Maire. Plus de 70 démobilisés, unis à MM. les membres du Conseil municipal y prirent part. A la table d’honneur étaient à droite de M. le Maire, M. le doyen et M. le Comte d'Olliamson; à sa gauche, M. le Juge de paix ; toutes les autres tables étaient présidées par un conseiller municipal.
Dire que le repas commença par la récitation publique du « Bénédicité » c'est montrer assez l'esprit qui animait les invités.
Le repas tout entier d'ailleurs fut charmant de cordialité, d'entrain, de saine gaieté, les toasts de M. le Maire, de M. le Conseiller général, de M. le Juge de paix et les remerciements des poilus furent fort applaudis — non moins applaudie fut la délicate pensée qu'eurent les jeunes filles du bourg de venir offrir une gerbe de fleurs aux démobilisés ce qui leur valut une nouvelle gracieuseté de M. le Maire qui leur offrit gâteaux et champagne.
De beaux chants patriotiques terminèrent une réunion si pleine d'entente cordiale
Honneur à M. le Maire d'avoir ainsi compris ce que devait être la fête du souvenir! Nos félicitations à tous les organisateurs et à tous les habitants de Creully qui ont su faire de cette journée, en même temps une journée de prières pour nos chers morts et une journée de sympathique reconnaissance pour nos glorieux vainqueurs.