L’année 1675 fut désastreuse pour le budget de l’église de Crépon : 329 livres de recettes contre 489 livres de dépenses, dont 418 consacrées à la refonte des cloches ! Le livre de comptes nous permet de suivre pas à pas cette grande opération.
Tout commence le 16 juin 1675, par une
délibération des paroissiens. Sous la pression du curé, ils consentent à la
refonte de leurs trois cloches et désignent Jean Le Blais, écuyer, sieur de la
Vallée et alors trésorier en charge, pour traiter à Caen avec les fondeurs
Jacques Jonchon et Pierre Buisson.
Ensuite, quatre charpentiers de Crépon –
Robert et François Marie, Henri Foucher et Paul Corbel – descendent les cloches
de la tour et abattent des arbres pour fabriquer une grue et des échafaudages.
Michel Vallée, fermier du poids du roi à Creully, vient lui-même à Crépon pour peser le métal des vieilles cloches. Le charpentier Mathieu Tilloy et le couvreur Jean Bayeux construisent dans le cimetière un grand appentis destiné à accueillir la fonte des nouvelles cloches, car celle-ci sera réalisée sur place.
François Gorette et François Fouquet,
deux transporteurs, apportent à Crépon quatre charretées de gros cailloux,
trois de petits et deux bannelées de terre rouge ou d’argile, nécessaires à la
fabrication des fours. Les pierres, extraites de la carrière d’Orival par
Clément Le Tellier, laboureur, lui valent la somme de 50 sols.
Une fois les nouvelles cloches fondues
et pesées par Michel Vallée, il faut les monter dans le clocher. Pour cela, les
charpentiers installent trois pièces de bois au-dessus du beffroi de la tour et
deux planchers en dessous. S’aidant d’une échelle et d’un brancard qu’ils ont
eux-mêmes confectionnés, ils achèvent leur ouvrage avec succès. Les cloches
sont graissées avec deux livres de graisse blanche et une livre de graisse
brune, puis... en avant le carillon !
Cependant, une telle entreprise ne
pouvait se conclure sans un procès. En effet, les paroissiens de Crépon,
sensibles à la qualité du son, ne tardent pas à constater que leurs cloches ne
sont pas en harmonie. Sans attendre, Jean Le Blais se rend à Caen pour
consulter l’avocat Gouville, qui intente un procès contre les deux fondeurs.
Ces derniers sont condamnés à refondre la petite cloche et à la remettre au
diapason.