Je vais vous parler d’un de mes héros : Pierre Barette mon grand-père paternel.
Il naquit en octobre 1896 à Bernières sur Mer sous le nom de Matelot Pierre Engène Emile. Matelot était le nom de sa mère, Marie augustine, fille mère. 5 ans plus tard, elle épousa Barette Léon qui fit acte de reconnaissance de Pierre.
Pierre MATELOT devint Pierre BARETTE
Le 19 novembre 1920 il épousa Berthe Arsène à Douvres la Délivrande. A la fin des années 20, il rejoignit l'administration des Postes à Creully comme facteur rural.
Le facteur rural
Héros parmi ces modestes et si utiles fonctionnaires que nous avons rencontrés cent fois peut-être dans nos campagnes, le havresac sur le dos et le bâton à la main, le front baigné de sueur ou les cheveux blanchis par le givre.
Le soleil de mai se lève à peine derrière les carrières d’Orival, la rosée du matin perle encore sur les hautes herbes de la prairie, que déjà le facteur rural quitte la poste sur la place du marché de Creully et se met en route.
Mon grand-père... le facteur |
Son havresac dont le cuir fut verni autrefois est un sanctuaire dont lui seul à la clef. Malheur à l'imprudent qui tenterait d'en connaître les secrets, le facteur rural défendrait ce dépôt sacré jusqu'à la dernière goutte de son sang.
Il y a, dans ce fidèle compagnon de sa vie, la joie ou la douleur de vingt villages ; le bonheur ou le malheur de cent familles peut-être.
A côté de ce billet d'amour, voici l'infâme lettre anonyme qui va jeter son venin immonde sur une famille honnête, et faire tous ses efforts pour troubler la bonne harmonie qui règne entre tous ses membres.
Sa tournée passait par le pont de Colombiers sur Seulles. |
Dans un coin, il y a la lettre chargée, orgueilleuse comme tous les enrichis de fraîche date, et semblant dédaigner la société de ses sœurs. Sous cette frêle enveloppe il y a l'aisance pour toute la vie, le facteur rural le sait, et cependant l'idée de s'approprier ces valeurs ne lui vient même pas à l'esprit.
Cet homme est l'honnêteté incarnée ; sa mission est toute de confiance, il n'y faillira jamais.
La poste de Creully vers 1915 |
Devant la poste dans les années 30. |
Mon grand-père est un ancien soldat de notre brave armée. Il a fait les campagnes d’Ardennes, des tranchées, de Verdun, que sais-je ! Il s'est amassé un trésor de souvenirs qui font sa gloire présentement, et qui dans sa vieillesse fera les délices de ses petits-enfants, auxquels il racontera ses actions d'éclat.
Son poste actuel, du reste, a beaucoup d'analogie avec les habitudes du régiment.
Comme le soldat, le facteur rural part et revient à heure fixe ; son étape est tracée à l'avance et il ne peut rien changer à son parcours ; malgré les mille séductions qu'offrent les villages, les jours de fête: le bal sous l'orme, les jeux sur la place ou devant l'église, le dîner qui se donne dans les fermes normandes lorsque les moissons sont rentrées, tout cela le laisse indifférent ; il reste sourd à toutes les invitations, il part où son devoir l'appelle. Permettez-moi d’avoir menti car il n’était pas sourd au tintement des verres de vin ou de gros bère.
Mon père à la gauche de mon grand-père |
Je pense à ma grand-mère et à ses enfants : Lucien, mon père, Maurice et Yvette qui l'attendent au logis et dont il est l'unique soutien.
Pierre, mon grand-père facteur rural était un sage.