Ce « marché aux domestiques » a été, et est resté une coutume essentiellement normande. Sa signification, à laquelle on ne pense guère, est riche d'enseignements, non seulement sur les coutumes normandes de tous temps, mais encore sur le caractère de nos compatriotes, au cours des siècles passés. C'est, en effet, parce que deux cents ans avant les autres provinces de France, les Normands avaient obtenu l'abolition du servage (dès le XIe siècle) qu'ils purent s'engager librement, et pour une durée qui était fixée au gré des parties. C'est ainsi qu'à côté de quelques rares engagements perpétuels (surtout avec certaines communautés), et d'engagements pour une ou plusieurs années, nos ancêtres, dès le xie siècle, eurent la possibilité de se louer pour un temps déterminé : les labours, le fauchage, le sciage de tant d'arbres, etc..., et enfin, même à la journée. Ils pouvaient, également, se louer seuls, ou encore avec leurs familles (femme et enfants), ou louer l'un des leurs.Un cartulaire des religieux de Saint-Martin signale qu'en 1258 certains de leurs domestiques étaient payés, pour une année, 30 livres parisis.
En 1388, le chanoine de Mondaye écrit : « que l'on ne peut louer serviteurs pour cultiver et labourer les terres, que ne semble gaigner plus que six serviteurs ne faisaient au commencement du siècle » (donc, vers 1300 ; déjà !)
A partir du xve, la louerie pour une année devint la plus habituelle.
Les loueries avaient lieu surtout le 24 juin ou le 17 juillet, à la Saint-Jean ou à la Saint-Clair ; dans certaines régions, il y en avait, aussi, à la Madeleine, à la Saint-Jacques, etc...
En maintes régions, les valets de ferme, les commis de ferme, les servantes, cherchant une place, étaient réunis dans une prairie, parés de leurs atours du dimanche. A Coutances, la louerie avait lieu auprès de la halle aux grains.
Les servantes avaient un « bouquet » épinglé sur le côté gauche du corsage ; les fileuses, une quenouille à la main ; les valets-charretiers extériorisaient leur fonction principale par un fouet sur l'épaule ; les bergers, par un chien tenu en laisse ; les batteurs, par un fléau sur l'épaule.
Maîtres et maîtresses se promenaient de groupes en groupes, en examinant les domestiques. Quand ils en avaient trouvé un qui leur plaisait, ils s'approchaient et prononçaient la phrase sacramentelle : « Combien le fouet ?» ou, pour une servante : «combien le bouquet ?» L'intéressé ayant dit son prix, le maître lui demandait alors d'où il sortait, et ce qu'il savait faire (comme dit la vieille Frasie, avec sa langue d'empigne : « Ché terjours cht'eu joû là qui en savent fair l'pus »),
Vice-versa, ayant répondu, le domestique, à son tour, se renseignait sur ce qu'il aurait à faire comme travail chez son futur maître. Puis, le prix demandé était débattu ; le domestique s'engageait pour une année moyennant un certain nombre de pistoles (une pistole = 10 fr.), et, souvent, le don d'une blouse et d'une ou deux paires de sabots. Vers 1900, un bon valet était payé environ 40 pistoles pour une année,
Les conditions ayant été arrêtées, le fermier et le domestique se frappaient dans les mains ; et cet engagement verbal était respecté, dans l'immense majorité des cas.
Tout ayant été ainsi arrêté, le maître avait encore à donner, et de suite, « le vin » qui s'élevait à 5 fr. pour les débutants, et à une pistole pour les domestiques adultes.
Quand un valet avait ainsi conclu un engagement, il enlevait le fouet qui entourait son cou ; de même, la servante engagée déplaçait son bouquet et le mettait sur le côté droit.
La louée (louerie) qui, généralement, était terminée pour 10 heures, finissait par des libations dans les auberges, ou sous de longues tentes, dressées pour la circonstance Au temps jadis, on y servait, dans des godias, du cidre à l'aide des « puchi » fabriqués spécialement pour ce service lors des assemblées et des foires, parce qu'ils versaient le cidre plus vite que les bouteilles ou les choquets.
Les domestiques loués à la Saint-Jean (24 juin) entraient en fonction à la Saint-Clair (17 juillet) ; et ceux qui étaient loués à la Saint-Clair commençaient leur service quelques jours plus tard.
Ils apportaient dans leur nouvelle place leurs hardes et tout leur avoir dans un coffre, ou dans une petite commode-armoire, dite « de domestique.
C’est dans le magnifique ouvrage « la Normandie ancestrale » de Stephen-Chauvet des éditions Colas que j’ai puisé ce texte.
En 1388, le chanoine de Mondaye écrit : « que l'on ne peut louer serviteurs pour cultiver et labourer les terres, que ne semble gaigner plus que six serviteurs ne faisaient au commencement du siècle » (donc, vers 1300 ; déjà !)
A partir du xve, la louerie pour une année devint la plus habituelle.
Les loueries avaient lieu surtout le 24 juin ou le 17 juillet, à la Saint-Jean ou à la Saint-Clair ; dans certaines régions, il y en avait, aussi, à la Madeleine, à la Saint-Jacques, etc...
En maintes régions, les valets de ferme, les commis de ferme, les servantes, cherchant une place, étaient réunis dans une prairie, parés de leurs atours du dimanche. A Coutances, la louerie avait lieu auprès de la halle aux grains.
Les servantes avaient un « bouquet » épinglé sur le côté gauche du corsage ; les fileuses, une quenouille à la main ; les valets-charretiers extériorisaient leur fonction principale par un fouet sur l'épaule ; les bergers, par un chien tenu en laisse ; les batteurs, par un fléau sur l'épaule.
Maîtres et maîtresses se promenaient de groupes en groupes, en examinant les domestiques. Quand ils en avaient trouvé un qui leur plaisait, ils s'approchaient et prononçaient la phrase sacramentelle : « Combien le fouet ?» ou, pour une servante : «combien le bouquet ?» L'intéressé ayant dit son prix, le maître lui demandait alors d'où il sortait, et ce qu'il savait faire (comme dit la vieille Frasie, avec sa langue d'empigne : « Ché terjours cht'eu joû là qui en savent fair l'pus »),
Vice-versa, ayant répondu, le domestique, à son tour, se renseignait sur ce qu'il aurait à faire comme travail chez son futur maître. Puis, le prix demandé était débattu ; le domestique s'engageait pour une année moyennant un certain nombre de pistoles (une pistole = 10 fr.), et, souvent, le don d'une blouse et d'une ou deux paires de sabots. Vers 1900, un bon valet était payé environ 40 pistoles pour une année,
Les conditions ayant été arrêtées, le fermier et le domestique se frappaient dans les mains ; et cet engagement verbal était respecté, dans l'immense majorité des cas.
Tout ayant été ainsi arrêté, le maître avait encore à donner, et de suite, « le vin » qui s'élevait à 5 fr. pour les débutants, et à une pistole pour les domestiques adultes.
Quand un valet avait ainsi conclu un engagement, il enlevait le fouet qui entourait son cou ; de même, la servante engagée déplaçait son bouquet et le mettait sur le côté droit.
La louée (louerie) qui, généralement, était terminée pour 10 heures, finissait par des libations dans les auberges, ou sous de longues tentes, dressées pour la circonstance Au temps jadis, on y servait, dans des godias, du cidre à l'aide des « puchi » fabriqués spécialement pour ce service lors des assemblées et des foires, parce qu'ils versaient le cidre plus vite que les bouteilles ou les choquets.
Les domestiques loués à la Saint-Jean (24 juin) entraient en fonction à la Saint-Clair (17 juillet) ; et ceux qui étaient loués à la Saint-Clair commençaient leur service quelques jours plus tard.
Ils apportaient dans leur nouvelle place leurs hardes et tout leur avoir dans un coffre, ou dans une petite commode-armoire, dite « de domestique.
C’est dans le magnifique ouvrage « la Normandie ancestrale » de Stephen-Chauvet des éditions Colas que j’ai puisé ce texte.